Festival | Yann Passabet-Labiste et Bertrand Giraud triomphent à Besançon

Dimanche 14 septembre 2025, il est 11 heures. Le superbe et parfait auditorium Kreisler, nommé en hommage au créateur du Festival en 1948, est archi-comble. Le 11ème concert de cette 78ème édition qui ouvre sa 3ème journée, est complet depuis longtemps. 300 paires d’yeux contemplent le piano qui trône sur la scène, impérial, et attend son maestro. Deux pupitres font les pieds de grue à sa droite. L’âme d’un violon et son archet ailé vont s’en saisir. Yann Passabet-Labiste et Bertrand Giraud ont choisi de fêter le romantisme, mais pas que, de réparer une injustice et de nous enchanter. Pari tenu haut l’archet et grand le Steinway !

Absente du générique de la F.A.E., Clara retrouve son Robert dans une première partie où, comme chez les Schumann, la mélancolie flirte avec les sautes d’humeur. Quand avec Brahms, Schumann offre à leur ami Joachim la sonate F.A.E. (Frei aber einsam, libre mais solitaire, la devise de Joachim), il écarte Clara du projet mais reprend pour sa n°3 l’opus plus ancien qui lui déclarait sa flamme. Plus Schumann, tu meurs ! Agile et expressif, l’archet de Yann Passabet-Labiste se plait dans tous ses états que le piano virtuose et sensible de Bertrand Giraud apaise ou attise au gré du compositeur. Les deux talents réunis donne aux Trois Romances de Clara l’air et le coeur de poèmes sans paroles.

De l’amour au Caprice il n’y a qu’un pas, au moins chez les Schumann. Après une courte pause nos deux compères invitent Ysaÿe à faire ce pas avec un élan qui emporte le public. La valse annonce Ravel se disent les connaisseurs qui n’en doutent plus quand vient Satie. Le dyptique choisi rompait en son temps avec le romantisme et ses excès, enchantait Ravel et nous captive à présent, simple et intense, sous des doigts sûrs au toucher de rêve. La grâce comme le proclame le sourire du tourneur saisi lui aussi. Tout a été dit sur le dernier Ravel format chambriste. Si les voyages forment la jeunesse, Ravel en a nourri la seconde partie de sa vie et l’envie d’une sérénité disparue si tant est qu’elle ait un jour existé. Alors on sort, alors on danse ! La valse, le blues, le boléro. Les masques étrangers de Ravel (Rara pour les intimes) ont du mal à cacher ses accents français. Comme l’ironie a du mal à cacher la timidité et la nonchalance l’orgueil. Cette dualité rivale, incisive et fertile éclate avec brio au grand plaisir du public qui acclame les artistes et en redemande.

La F.A.E. justement lui répond avec le scherzo signé Brahms et ses véritables riffs au piano, déjà, avant Ravel. “On veut en entendre encore” réclame la salle, Nadir arrive, son air fameux des Pêcheurs de Perles sous l’archet et sur l’ivoire du Steinway. Altier, tendre et généreux. noble et sentimental aurait dit Ravel qui goûtait guère Bizet mais aimait les paradoxes : la musique fait parfois son lit entre deux choses que tout oppose.

Chapeau les artistes et merci !

78ème Festival international de musique Besançon Franche-Comté

Yann Passabet-Labiste, violon
Bertrand Giraud, piano

Programme :
Robert Schumann : Sonate n°3 Wo0 2
Clara Schumann : Trois Romances op.22
Eugène Ysaÿe : Caprice d’après l’Etude en forme de valse op.52 de Camille Saint-Saëns
Erik Satie : Gymnopédie n°1 – Gnossienne n°1
Maurice Ravel : Sonate pour violon et piano

En bis :
Brahms : Scherzo de la Sonate F.A.E.
Bizet : Air de Nadir “Je crois entendre encore” extrait des Pêcheurs de Perles

Besançon, Cité des Arts – Dimanche 14 septembre 2025, 11 heures

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